Eric Pasture Belge, 1958

• Dans l'approche d'Eric Pasture à l'abstraction matérialiste, son goût physique, presque artisanal pour un matériau, est mesuré, une pâte lisse étalée, peignée, lissée, rendue soyeuse comme une tunique, ou écrasée, canalisée, étalée par la spatule qui la contraint, la ramenant dans des zones plates, laissant place à des lèvres mouillées ou à des bords délicats. Le rouge, couleur du feu et du sang, a cependant la même ambivalence symbolique que ce dernier, sans aucun doute, visuellement parlant, selon qu'il est vif ou sombre. Avec cette seule couleur majeure, riche en toutes les autres, l'artiste mène et raconte son monde, fait de mouvement et de retenue, d'ombres et de clarté, d'impulsions et de repos. Lorsque la lumière extérieure se confond avec ces champs de peinture, elle se diffuse en infinies nuances qui ne se lassent jamais de notre regard.

• Les toiles d'Eric Pasture nous fournissent quelques réponses à cette question persistante qui reste aussi ouverte que celle de l'humanité : comment capturer les couleurs du monde dans une construction universelle ? Apparemment, le réel est plein de couleurs, mais les couleurs, en réalité, n'existent pas. Celles que nous voyons dépendent de la lumière que le monde extérieur dirige vers nos yeux, mais les idées de «rouge» ne naissent que dans les profondeurs de notre cerveau. Les couleurs ne sont donc pas seulement les «exploits de la lumière» comme l'a dit Goethe : elles sont aussi les exploits de moi. Nous nous servons de nous-mêmes pour orner le monde et nous le faisons pour nous.

• Refusant de limiter son art à un seul médium, Eric Pasture explore le dessin, la peinture, la calligraphie, l'aquarelle ou même l'écriture sous toutes ses formes : éthiopienne, runes, arabo-malgache, birmane, tibétaine, kanada... Il prône l'expérimentation, un échange décisif pour la découverte de nouvelles expressions. Eric Pasture réexamine les traces d'un langage et laisse émerger l'inconnu au tournant de son expression adaptée à l'exploration des signes et des formes. L'encre se mélange à de multiples matériaux et les compositions s'enrichissent comme une «peinture à champs de couleurs». Nous retrouvons ces caractères dans une exubérante nuée de formes abstraites en gestation, une reprise du désir de l'artiste de mettre en valeur les références nobles et populaires de la diversité culturelle au service de sa personnalité, de sa singularité.